premières vues du monastère de la Fosse
Après avoir entrapperçu au loin la majesté de la quasi montagne sainte, l'Ararat, nous voyons enfin la silhouette de "KOR VARAP", le monastère de la Fosse. C'est un peu ici que l'Eglise arménienne est née, c'est ici dans un "cul de basse fosse" que Saint Grégoire l'Illuminateur de l'Arménie a vécu un tête à tête avec le Seigneur, donnant pour toujours à l'Eglise arménienne son visage de contemplation.
Les grandes plaines à la culture insolite pour nous ne cessent de laisser paraître la roche, colorée et solide. L'Arménie est un pays de montagne, c'est un pays de roche. Sa culture, son peuple, sa foi sont ancrés dans le roc. Nous sommes loin des plaines fertiles de Picardie.
Dès l'arrivée nous sont proposées des colombes, elles sont achetées pour exprimer les voeux; elles sont lachées et s 'envolent au dessus du monastère avant de tournoyer puis de s'élancer (sans doute pour retourner chez les vendeurs et revenir le lendemain à la vente....).
Ces colombes et l'Ararat au loin nous évoquent bien sûr le livre de la Genèse. c'est presqu'ici que Noé lacha sa colombe depuis l'Arche pour savoir si les eaux du Déluge s'étaient retirées. Elle est revenue avec son rameau d'olivier, annonçant la fin de la colère divine. POur moi c'est vraiment l'expression que l'Arménie est née de ce salut de Dieu, de ce nouveau monde, de ce peuple qui attend le Royaume de Dieu, la consolation.
Tout ici me parle de cette attente : la terre aride et pauvre, la solitude du lieu, sa majesté aussi. Nous découvrons aussi cette couleur si particulière de la pierre arménienne, ce roux grisâtre, cette couleur entre le Ciel et la terre. Au sommêt de la butte, le monastère et sa coupole octogonale si typique nous parle de cette attente du Christ. Octogone pour rappeler le 8e jour, le Jour de la Résurrection. 7 jours c'est une semaine, du temps qui passe, le 8e c'est le jour qui est au-delà de la semaine, au-delà du temps: c'est le Royaume!
Au sommêt de la coupole, la Croix Arménienne, elle aussi avec les 8 pointes de ses extrémités nous tourne le regard vers le Ciel. Ici la terre, les enfers de la Fosse et le Ciel se rencontrent. Le Peupe arménien a toujours tenu que ses églises étaient construites comme des colonnes rejoignants Ciel et terre. Le rude paysage arménien est tellement plein d'espérance. Le mur d'enceinte du monastère, après une petite escalade nous sépare encore de cette porte du Royaume, nous approchons du lieu où le Ciel et la terre se sont rencontrés en saint Grégoire.
Pourtant, nos regard sont comme aimantés par le seigneur de ces lieux, celui vers qui le Peuple arménien garde le regard tendu: l'Ararat sainte!
Au milieu de ses neiges éternelles, toute l'identité d'une nation est concentrée. Et pourtant, il a partagé jusque l'épreuve du Génocide, il est retenu prionnier loin de sa patrie qui le chérit tant, il est le prisonnier perpétuel du voisin, occupé par la Turquie depuis le génocide, il est un cri permanent de la conscience arménienne. Pas une fois il ne paraîtra sans que tous s'extasient, sans que le cri "l'Ararat!" ne retentisse. Ce géant comme mort loin de sa terre et de sa foi est là, si près et pourtant impossible à rejoindre. Quelle merveille de le voir, quelle torture de ne pouvoir le rejoindre. Toute l'Arménie le conemple et le pleure.
Est- ce un hasard si au sommêt de l'Ararat l'Arche de Noé est venue apporter le peuple de l'Alliance et si ici au fond de la fosse la nouvelle alliance est venue par saint Grégoire? " que toute langue proclamme Jésus Christ Seigneur et que tout genou fléchisse au Ciel, sur terre et aux enfers!"
L 'Ararat aujourd'hui se cache à nous, il le fera souvent avat de se révéler. Les Arméniens lui ressemblent étrangement. Ils sourient peu, parlent peu et se révèlent soudain. L'Ararat se mérite.